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La cotisation sur commissions secrètes est partiellement inconstitutionnelle

La Cour constitutionnelle a récemment jugé qu’une cotisation sur commissions secrètes ne peut pas être appliquée à une société qui a attribué une rémunération, sans établir une fiche et un relevé ad hoc, si le bénéficiaire de cette rémunération a été effectivement imposé dans les délais légaux d’imposition.

 

Pour rappel, l’article 219 du Code des impôts sur les revenus oblige les sociétés qui attribuent une somme ou un avantage de toute nature qui constitue un revenu professionnel pour son bénéficiaire, à justifier cette somme ou cet avantage par la production de fiches individuelles et d’un relevé récapitulatif. A défaut, une cotisation distincte égale à 100% de la somme ou de l’avantage de toute nature attribué lui sera infligée[1].

 

Le législateur a, toutefois, prévu deux exceptions qui permettent à une société d’échapper à la cotisation distincte. La première consiste à démontrer que les dépenses non justifiées par une fiche et un relevé ad hoc ont été déclarées par le bénéficiaire. La seconde vise à identifier le bénéficiaire de manière univoque dans un délais de 2 ans et 6 mois à partir du 1er janvier de l’exercice d’imposition concerné.

 

La condition de délai (2 ans et 6 mois) dans lequel l’identification doit intervenir est destinée à permettre à l’administration d’imposer le bénéficiaire dans le délai d’imposition de 3 ans. Ainsi, l’administration dispose d’une période d’au moins 6 mois pour établir un supplément d’impôt dans le chef du bénéficiaire tout en respectant la procédure de rectification.

 

C’est la seconde exception qui a retenu l’attention de la Cour constitutionnelle[2]. Selon la Cour, « si l’administration fiscale constate un avantage de toute nature non déclaré en identifie le bénéficiaire de manière univoque et soumet celui-ci à l’impôt applicable dans les délais d’imposition légaux ou a encore la possibilité de le faire, il n’est pas raisonnablement justifié […] que la personne qui octroie l’avantage soit soumise à une cotisation distincte. L’inverse conduirait à ce que tant celui qui octroie que celui qui bénéficie de l’avantage puissent être soumis aux dispositions appropriées, ce qui va au-delà de la simple compensation, poursuivie par le législateur, d’une perte de recettes fiscales ».

 

La Cour a donc décidé qu’il existe une discrimination dans la mesure où une société pourra éviter la cotisation distincte si le bénéficiaire a été identifié dans un délai de 2 ans et 6 mois alors que si l’identification arrive au-delà de ce délai, la société se verra infliger une cotisation de 100% alors que le bénéficiaire aurait été imposé dans le délai légal.

 

L’administration fiscale a, d’ores et déjà, confirmé qu’elle appliquera cette jurisprudence dans les litiges pendants au stade administratif et judiciaire dans l’attente d’une modification législative.

 

En conséquence, je ne peux qu’inviter tout un chacun à examiner de près les cotisations distinctes qui auraient été infligées et de contester celle-ci par la voie de la réclamation ou de la demande de dégrèvement d’office. En effet, l’administration considère de longue date qu’un arrêt de la Cour constitutionnelle constitue un fait nouveau qui ouvre droit à un dégrèvement d’office.

 

Ludovic Hubert

Associé

LawTax

 

 

[1] Si le bénéficiaire de l’avantage est une personne morale, le taux est fixé à 50%.

[2] Cour cons., 26 septembre 2019, RG n° 125/2019.