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Du nouveau pour les montages immobiliers.

Notre arsenal législatif s’est récemment doté d’un nouveau code civil, qui comporte un nouveau droit des biens, lequel est entré en vigueur le 1er septembre 2021.

Ce nouveau droit des biens, qui a notamment trait au droit d’usufruit, au bail emphytéotique et au droit de superficie, est dès lors applicable de plein droit à tout montage immobilier de cet ordre réalisé à compter de cette date.

La loi prévoit qu’en principe, les montages antérieurs, et les effets juridiques postérieurs au 1er septembre 2021 relatifs à ces montages, restent régis par les anciennes dispositions légales. Pour ces montages, rien ne change donc en principe. Toutefois, il est possible que les parties s’accordent pour, moyennant un passage chez leur Notaire, soumettre sur une base volontaire les effets futurs de montages anciens aux dispositions du nouveau droit des biens.

Sur le plan civil, les nouvelles dispositions ont été pensées dans l’esprit d’une grande souplesse d’utilisation et d’une vision plus économique de tels montages.

On peut notamment mettre en exergue certaines dispositions qui ne sont pas sans importance pratique, tant pour les personnes physiques que pour les sociétés.

En ce qui concerne la durée, l’usufruit d’une personne physique peut être au maximum viager, et il est possible de convenir d’usufruits multiples (octroyés en même temps à deux personnes ou plus, cet usufruit s’accroissant de plein droit dans le chef du survivant en cas de prédécès d’un autre usufruitier) ou successifs (une autre personne désignée dans l’acte devenant dans cette hypothèse usufruitière en cas de prédécès du premier usufruitier). L’usufruit d’une personne morale peut quant à lui désormais d’exercer durant une période maximale de 99 ans, contre 30 ans auparavant. Il peut éventuellement être perpétuel dans certaines hypothèses. Par ailleurs, les parties pourront désormais prendre en charge les travaux réalisés dans le bien, quelle que soit leur nature, en fonction de la valeur économique de leur droit respectif dans la valeur globale du bien.

Le nouveau texte légal dispose également que l’usufruit d’une personne morale s’éteint de plein droit en cas de faillite ou dissolution de la personne morale concernée. Il s’agit d’une avancée importante par rapport à la situation antérieure dans la mesure où le curateur pouvait auparavant considérer cet usufruit comme un actif de la faillite, et dès lors en monnayer la cession. Il est donc possible d’y échapper et de mettre l’usufruit à l’abri des créanciers (sauf la banque qui disposerait d’une hypothèque sur l’immeuble) en soumettant d’anciens usufruits à la nouvelle loi.

Le bail emphytéotique peut désormais être convenu pour une durée minimale de 15 ans et une durée maximale de 99 ans. Cette nouveauté est importante, notamment pour les montages immobiliers comportant à la fois un bail emphytéotique et une convention de leasing immobilier, laquelle doit impérativement avoir une durée de 15 ans. Il est désormais possible que les deux droits aient la même durée, ce qui, sur le terrain, est susceptible de mettre fin à de nombreuses difficultés auparavant difficiles à solutionner en pratique.

Le droit de superficie peut quant à lui courir également sur une durée maximale de 99 ans, contre 50 ans auparavant.

Enfin, un régime d’indemnisation commun au droit d’usufruit, au bail emphytéotique et au droit de superficie figure dans les nouvelles dispositions légales. En vertu de celles-ci, le nu-propriétaire (en cas d’usufruit) ou le tréfoncier (pour le bail emphytéotique et le droit de superficiaire doit indemniser l’autre patrie en fin de montage à concurrence de l’enrichissement injustifié dont il bénéficie par la récupération des travaux et constructions. Il s’agit là d’une évolution notable, dont on cerne toutefois mal les effets pratiques, notamment sur le plan fiscal. En effet, ce type de montages suscite un vif intérêt de la part de l’administration fiscale, surtout lorsqu’il fait intervenir des dirigeants d’entreprises et leurs sociétés professionnelles ou de management et est source d’un important contentieux aux enjeux financiers souvent important. Or, l’administration fiscale n’a, à ce jour, pris aucune position officielle quant aux effets fiscaux de cette importante réforme pourtant déjà en vigueur et annoncée de longue date. On ne peut que le déplorer et inviter tout contribuable impliqué dans un montage immobilier en cours ou projeté de s’informer ou de prendre conseil à cet égard.

Thierry Litannie

Avocat spécialisé en droit fiscal (LAWTAX Avocats)
Co-président de l’ECOFIN TAX CLUB